Lorsque tu vins, à pas réfléchis, dans la brume,
Le ciel mêlait aux ors le cristal et l’airain.
Ton corps se devinait, ondoiement incertain,
Plus souple que la vague et plus frais que l’écume.
Le soir d’été semblait un rêve oriental
De rose et de santal.
Je tremblais. De longs lys religieux et blêmes
Se mouraient dans tes mains, comme des cierges froids.
Leurs parfums expirants s’échappaient de tes doigts
En le souffle pâmé des angoisses suprêmes.
De tes clairs vêtements s’exhalaient tour à tour
L’agonie et l’amour.
Je sentis frissonner sur mes lèvres muettes
La douceur et l’effroi de ton premier baiser.
Sous tes pas, j’entendis les lyres se briser
En criant vers le ciel l’ennui fier des poètes
Parmi des flots de sons languissamment décrus,
Blonde, tu m’apparus.
Et l’esprit assoiffé d’éternel, d’impossible,
D’infini, je voulus moduler largement
Un hymne de magie et d’émerveillement.
Mais la strophe monta bégayante et pénible,
Reflet naïf, écho puéril, vol heurté,
Vers ta Divinité.
—
Ta forme est un éclair qui laisse les bras vides,
Ton sourire est l'instant que l'on ne peut saisir...
Tu fuis, lorsque l'appel de mes lèvres avides
T'implore, ô mon Désir !Plus froide que l'Espoir, ta caresse cruelle
Passe comme un parfum et meurt comme un reflet.
Ah! l'éternelle faim et la soif éternelle
Et l'éternel regret !Tu frôles sans étreindre, ainsi que la Chimère
Vers qui tendent toujours les voeux inapaisés...
Rien ne vaut ce tourment ni cette extase amère
De tes rares baisers !
'Sonnet' & 'A la femme aimée', Renée Vivien
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